Au XVIIIe siècle, alors que la police n’est pas encore une institution à part entière, mais une pratique de gouvernement dispersée et hétérogène, la modernité policière se prépare efficacement. Comment et dans quelles circonstances l’ancienne mission pastorale de la police, conçue de manière étendue pour orienter les hommes et leurs conduites, se réduit-elle progressivement à des fonctions sécuritaires et judiciaires ? Pour répondre à cette question, ce livre étudie le cas de la petite République de Genève, considérée en son temps comme un modèle de « parfaite administration », mais ignorée jusqu’à ce jour de l’historiographie de la police. La réduction d’échelle que la cité-État offre à l’analyse a son importance. Elle permet de saisir ensemble des transformations de la police intimement liées, mais généralement traitées isolément les unes des autres. Au XVIIIe siècle, l’économie normative des ordonnances de police justifie l’émergence de techniques plus fines de régulation sociale. De même, la redéfinition des moyens d’action de la magistrature, incarnée à Genève par le Tribunal du lieutenant, s’adosse à la participation accrue des militaires au gouvernement de la cité. La reconfiguration des pratiques policières |