Un peu plus de cinquante ans après sa conceptualisation, qu’en est-il de la « Révolution atlantique » proposée par Robert Palmer et Jacques Godechot ? Une ère de la liberté, celle des démocraties modernes, celles des républiques fondées autour d’un État-nation, allait naître, après 1789, non sans heurts ni violences, mais avec une matrice commune, construite de part et d’autre de l’Atlantique sur la certitude de garantir les droits de la souveraineté des nations par la rédaction de constitutions et sur la conviction de devoir protéger les libertés individuelles par l’octroi de droits imprescriptibles à chaque citoyen, (mais différents pour les citoyennes), politisé et responsable. Dans cette perspective, il est temps de déconstruire le mythe d’une France comme la « Grande Nation » (première grande manipulation langagière de Bonaparte) mais de considérer le Directoire (1795-1799) comme une république européenne, un carrefour d’expériences largement partagées au niveau d’un continent encore en guerre. Ainsi, le Directoire, et malgré tous ses défauts sans cesse exagérés depuis deux cents ans, doit retrouver la dimension d’un laboratoire des sciences politiques ouvert sur le monde américain, européen, mais aussi sur la Méditerranée. Ce volume permet d’interroger la façon dont les différentes révolutions et républiques se sont plus qu’enchaînées, emboîtées, comment elles se sont regardées et comprises, comment elles ont reçu et assimilé les nouvelles des changements radicaux dans d’autres espaces politiques et géographiques, et en retour comment elles ont honoré ou stigmatisé d’autres expériences de rupture. Cela autorise aussi à penser la façon dont leur parcours spécifi que a engendré des modèles différents : républiques démocratiques, fédérales, consulaires, laïques ou fortement marquées par le fait religieux… |