Hier, en 1991, la découverte de plusieurs milliers de pages manuscrites préparait l’éclatement de l’obus Roussel et, à Cerisy, un colloque interrogeait la place de l’auteur dans l’histoire littéraire, sous le titre : Raymond Roussel, perversion classique ou invention moderne ? Aujourd’hui, au début du XXIe siècle, Roussel reste un auteur pour happy few, mais son œuvre a su trouver, tout au long du siècle dernier, des lecteurs fervents, pour qui elle a représenté une sollicitation esthétique et théorique majeure. L’influence de Roussel parcourt l’art et la pensée du XXe et du XXIe siècles. Là où on pouvait l’attendre, accompagnant les réinventions littéraires successivement expérimentées par les surréalistes, les nouveaux romanciers et les oulipiens mais là, aussi, où elle était moins attendue, venant étayer la réflexion de grands penseurs comme Gilles Deleuze et Michel Foucault. Aujourd’hui, un deuxième colloque de Cerisy a apporté, vingt-et-un ans après, une réponse inattendue à l’interrogation formulée par le premier, en proposant d’inscrire l’auteur dans la postmodernité, en montrant comment la puissance inventive de ses œuvres leur permettent d’inspirer des expériences artistiques hybrides et risquées ; en montrant aussi à quel point les textes de Roussel sont toujours des lieux donnant à penser des questions aussi fondamentales que la linéarité du signifiant, les contradictions entre la logique matérialiste du procédé et la vanité de l’égo, les limites du théâtre, la place des contraintes dans l’histoire littéraire, les différentes formes de transposition des textes dans d’autres domaines esthétiques, la remédiatisation des textes par les médias numériques… |