La disparition des « systèmes » universels, dans la pensée et dans les arts, ainsi que la connaissance de plus en plus approfondie des diverses cultures non européennes, ont provoqué la multiplication des codes relatifs et éphémères, liés à une personnalité ou à un groupe, et sans cesse remis en question. Les compositeurs, au cours du vingtième siècle, n'ont cessé de repenser les relations complexes du matériau et du langage, de la construction et de l'intuition, des systèmes conçus et des systèmes perçus, de la tradition et de l'expérimentation... Comment peut-on appréhender une oeuvre qui ne s'inscrit pas dans un code reconnu ? Peut-elle seule instaurer un ordre perceptible et signifiant? Faut-il partir, comme Fred Lerdahl, à la recherche d'universaux, ou considérer, avec François Nicolas, que la dissociation entre l'écriture et la perception est irrémédiable ? Est-ce une question qu'il faut résoudre par l'analyse technique ou par la réflexion philosophique, comme le tentent Lev Koblyakov, Marcelle Guertin, Anthony Newcomb et Erwin Laszlo, ou faut-il faire appel à la psychologie expérimentale, comme le suggère, par ses travaux, Irène Deliège ? L'oeuvre, nous rappellent toutefois Jean-Jacques Nattiez, Pierre-Michel Menger et Jürg Stenzl, ne peut être détachée de son contexte historico-idéologique; elle nécessite une approche sociologique, mais libérée de certains modèles trop réducteurs. Enfin, ne faut-il pas élargir notre champ de vision, relativiser nos critères d'appréhension en les confrontant, comme le fait Simha Arom, aux musiques d'autres civilisations ? Ces textes ont été lus, dans une première version, lors d'un symposium organisé par Contrechamps et l'Université de Genève en mars 1987. Retravaillés par leurs auteurs, ils sont tous inédits. Une discussion réunissant l'ensemble des protagonistes clôt ce volume. |