À travers une activité critique qui a commencé en 1937 dans la revue Modem Music, et qui fut consacrée quasi exclusivement à la musique contemporaine, Elliott Carter n'a cessé de réfléchir aux questions fondamentales de la composition et de l'esthétique musicales. Par ses appréciations sur les œuvres entendues en création, ses hommages à des compositeurs comme Stravinsky, Varèse, Ives ou Wolpe, qu'il a bien connus, et ses essais sur le rythme et le temps musical, Carter se situe de façon originale par rapport aux différents mouvements de la musique moderne : les avant-gardes américaine et européenne de la première partie du siècle, le néo-classicisme et le populisme américain des années vingt à quarante, les musiques sérielles et aléatoires de l'après-guerre. Cette traversée de l'histoire est aussi une tentative de définir sa propre position en tant que compositeur américain; au-delà de la « couleur locale », il cherche à penser la tradition américaine en relation avec les mouvements novateurs européens, critiquant au passage le conservatisme institutionnel de son pays. Les écrits d'Elliott Carter éclairent par ailleurs une démarche créatrice d'une richesse et d'une profondeur exceptionnelles, déployée sur plus de cinquante ans. Ce choix d'écrits paraît à l'occasion de son quatre-vingt-dixième anniversaire, en signe d'hommage et de reconnaissance. |