De la première pièce conservée du théâtre occidental (Les Perses d’Eschyle) au théâtre contemporain (Genet, Kantor, Müller, Koltès ou Bond), les morts n’ont cessé de hanter la scène occidentale. Le phénomène est assez frappant, pourtant les spectres – les « ombres », comme les dramaturges les appellent, du XVIe au XVIIIe s. – ont assez peu attiré l’attention, sauf celui de Hamlet. On sait qu’ils interviennent chez les tragiques grecs, chez Sénèque, Shakespeare, Strindberg et Ibsen ; on connaissait beaucoup moins le rôle qui leur est dévolu dans la tragédie humaniste, le théâtre élisabéthain, le ballet de cour, la tragédie du XVIIIe s., le drame et l’opéra du XIXe s. Et même dans le théâtre le plus proche de nous, leur présence obstinée n’a pas beaucoup soulevé l’intérêt des spécialistes. Ce volume entend réparer cet oubli en se penchant sur les raisons – théoriques, pratiques, voire politiques – qui ont favorisé le retour des morts, à travers vingt-cinq siècles de théâtre occidental. Ce ne sont pas seulement les textes dramatiques qui sont interrogés, et la théorie théâtrale, mais aussi les conditions de représentation, puisque les fantômes sont une source d’effets spectaculaires pour lesquels les hommes de l’art exploitent, avec une ingéniosité parfois confondante, toutes les ressources techniques qui leur sont accessibles. |