L'histoire de la barricade se heurte, à un réseau de tensions ou, plutôt, de proximités inattendues qui accentuent le mystère de cette histoire sainte et sanglante. La pensée sauvage s'y combine à la science, la barbarie au rêve d'humanité, l'élan des coeurs à l'attente immobile, la surabondance au vide, le fracas au silence. L'espoir d'avènement et l'attente de la mort s'y disent, simultanément. Derrière la barricade, il n'est, souvent, pas d'autre alternative que le triomphe ou la mort. La fête, ici, précède de peu l'immolation ; le rêve se mêle vite de désespoir. Le caractère éphémère du combat s'accorde, paradoxalement, à la profondeur de la mémoire ; et l'on pourrait croire, parfois, que la lutte menée n'a guère d'autre visée que la construction du socle sur lequel pourront se fonder les futurs combats. La barricade, jusqu'au milieu du xxe siècle tout au moins, n'a cessé de diviser, de révéler, de définir et d'accentuer les antagonismes. Pour les uns, elle est le lieu du sacrifice, le légitime prélude à la paix civile et à la réalisation du rêve ; pour les autres, elle évoque le paroxysme du désordre des objets et des hommes, le pire théâtre de la violence et de la saturnale. Pour les uns, elle prélude au sacrifice nécessaire ; pour les |